Javakhétie et la route des lacs

Écrit par Sébastien

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Le plateau de Javakhétie est une vaste étendue plane et herbeuse de steppes alpines avec plusieurs zones humides, dont six des plus grands lacs de Géorgie. Cette zone, habitat de nombreux oiseaux d’eau, est protégée par la convention de Ramsar. Le plateau est traversé du nord au sud par la chaîne montagneuse d’Abuli-Samsari, une série de cônes volcaniques où l’on trouve des forteresses mégalithiques. Surnommée « l’Arctique géorgien » en raison de son climat rude et impitoyable, toute la région de Javakhétie présente l’un des paysages les plus sauvages. Cette région est trop souvent un lieu de passage pour accéder à Vardzia, alors prenez un moment pour l’explorer grâce à ce guide.

Temps de lecture estimé : 15 minutes

Brève histoire de la Javakhétie

La région de Javakhétie était une principauté du royaume d’Ibérie avant que les Perses sassanides s’en emparent en 580. Elles sont alors gouvernées par une branche de la dynastie chosroïde d’Ibérie issue de Léon, un fils du roi Vakhtang Ier Gorgasali fondateur de Tbilissi. La principauté revient dans le giron géorgien en 780 sous le prince bagratide Adarnasé Ier. Elle a également constitué, au cours de son histoire, deux cantons de la province arménienne du Gougark. D’ailleurs, la région est peuplée de 54 % d’Arméniens.

Lors de l’indépendance des républiques caucasiennes, l’Arménie et la Géorgie revendiquent toutes deux cette région et celle de Lorri (actuellement en Arménie). Ils s’affrontent lors de la guerre arméno-géorgienne du 13 au 31 décembre 1918. Une médiation des Britanniques et des Français, en janvier 1919, confie l’administration de la région à la Géorgie moyennant la participation au pouvoir de la population arménienne. En juin 1921, la question est à nouveau examinée par les autorités soviétiques. Le 4 juillet 1921, le bureau soviétique chargé du Caucase rend sa décision, à laquelle Staline, alors commissaire du peuple responsable des nationalités, « n’est pas étranger », et confirme l’appartenance à la Géorgie.

Depuis l’indépendance du pays, en 1991, la Djavakhétie, éloignée des grands centres urbains et des voies de transports, peine à se développer.

Quoi voir sur la route des lacs de Javakhétie ?

Canyon de Dashbashi et le pont en forme de diamant

Le canyon de Dashbashi est le premier site naturel de Géorgie à avoir été privatisé et entièrement aménagé pour les touristes. Aujourd’hui, c’est une attraction très populaire dans la région. Il est souvent visité dans le cadre d’une excursion d’une journée au départ de Tbilissi. Creusé dans le plateau volcanique de Chochiani par la rivière Ktsia, le canyon de 8 km est une profonde cicatrice dans le paysage. De belles chutes d’eau allongées se déversent en cascade le long des parois rocheuses.

Le point d’intérêt principal est le pont de verre de 240 mètres de long qui enjambe le canyon. Au milieu, un café-bar en forme de diamant, totalement transparent, est la photo à ne pas manquer pour tous les influenceurs, et la pire des attractions pour ceux qui ont le vertige. Je ne vous cache pas qu’en été, il y a énormément de monde. Par ailleurs, les prix sont rédhibitoires, voire cocasses. En 2024, il faut débourser 79 GEL par personne pour accéder au canyon, 5 GEL pour le parking et encore 20 GEL si vous souhaitez remonter de la cascade en bus. C’est par conséquent, l’attraction la plus chère de Géorgie.

Outre le pont en forme de diamant, un sentier de 1 800 mètres de long vous mènera en toute sécurité jusqu’à une belle chute d’eau. Comptez 2 bonnes heures pour faire la balade à pied.

Diamond bridge tsalka

Canyon de Beshtasheni

Moins impressionnant que Dashbashi, le petit canyon de Beshtasheni est charmant. C’est l’endroit parfait pour pique-niquer, car vous avez la garantie de n’avoir aucun touriste. En plus, il dispose de tables au bord de la rivière.

Prenez quelques minutes pour vous enfoncer à pied dans le canyon avant de remonter à votre voiture.

Mosquée de Tsalka

La mosquée de Tsalka est le point d’intérêt le plus important de la ville. C’est l’une des douze mosquées de Méskhétie. Elle est utilisée par la communauté musulmane adjarienne de la ville, dont la plupart ont émigré ici pour des raisons économiques. Tout comme la synagogue de Gori, la mosquée de Tsalka se trouve à l’intérieur d’une maison ordinaire. De l’extérieur, on ne devine pas qu’il s’agit d’un édifice religieux. À l’intérieur, c’est un kaléidoscope de couleurs vives et de motifs, tous peints à la main par les membres de la congrégation et inspirés par les écrits du Coran.

Tsalka
Photo de Red Fedora Diary

Jusqu’à 2 000 fidèles de Tsalka et des villages environnants se rassemblent ici le vendredi. Les hommes prient au rez-de-chaussée tandis que les femmes utilisent les galeries à l’étage. Il y a généralement quelqu’un à la mosquée les matins en semaine, qui sera toujours heureux de vous ouvrir les portes et de vous faire visiter les lieux. Veillez à enlever vos chaussures et à vous couvrir les cheveux (femmes) si vous voulez entrer.

Les photos sont les bienvenues, et si vous parlez géorgien ou russe, les sympathiques gardiens vous expliqueront tout dans les moindres détails.

Pétroglyphes de Tikilisa

Les pétroglyphes de Tikilisa sont un ensemble de gravures rupestres du Mésolithique découvert dans les années 1880 et étudiés à l’époque soviétique. La plupart des images représentent des animaux locaux : Cerfs, chevaux, chèvres et poissons. Cela indique que la région était probablement boisée à l’époque.

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Le site contient apparemment plus de 100 pétroglyphes, mais seule une demi-douzaine est accessible. Malheureusement, le manque de protection a rendu les pétroglyphes vulnérables au vandalisme.

Monastère de Berta

Le dernier point d’intérêt près de Tsalka se trouve à Berta. Son monastère a été construit au VIe siècle et reconstruit par la communauté grecque de la région au XIXe siècle.

Il est intéressant de noter que l’église principale du complexe monastique a été construite directement sur une source vauclusienne. L’eau est recueillie dans un bassin de pierre que l’on peut voir depuis la cour de l’église ou depuis une ouverture dans le sol en pierre.

Le bassin de Berta est tout à fait unique : il abrite une population de « truites sacrées » qui sont censées guérir toutes sortes de maladies.

À l’intérieur de la petite église, un panneau de marbre est gravé d’une image de Jésus marchant sur l’eau avec une grosse truite prise entre ses orteils !

Couvent de Sainte Nino à Poka

Le lac volcanique de Paravani est un lieu de pèlerinage en soi. Lorsque sainte Nino de Cappadoce est entrée pour la première fois en Géorgie, elle est passée par cette région. Alors qu’elle se reposait au lac Paravani, elle a été témoin d’une apparition divine qui lui a dit de se rendre à Mtskheta pour rencontrer le roi.

À l’extrémité sud du lac, dans le village de Poka, l’église de Sainte Nino, avec son toit en bois usé par les intempéries et sa croix bien dessinée, rend hommage à la sainte. Outre le couvent en activité, le complexe abrite une école paroissiale, une clinique médicale et un atelier d’émail. Les religieuses exploitent également une petite ferme et une boutique de souvenirs.

Leurs créations comprennent du fromage et du beurre faits maison, des confitures, des conserves, des bougies en cire d’abeille, une gamme de crèmes pour le visage et de produits de beauté fabriqués à partir d’herbes et de fleurs locales. Tout est magnifiquement emballé et présenté.

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Gorelovka et les maisons des Doukhobors

Plusieurs villages sont disséminés autour de la réserve gérée de Bugdasheni, où les maisons présentent des encadrements de fenêtres et des volets ornés de bleu et de blanc. Ce sont les maisons traditionnelles des Doukhobors, des dissidents religieux russes que leurs croyances ont menés à entrer en conflit avec le gouvernement du tsar et l’Église orthodoxe. Ils ont émigré à Javakhétie dans les années 1840. Le plus emblématique de ces villages est Gorelovka, où se trouve une « Maison bleue », très emblématique.

Avant 1990, la communauté doukhobor de Javakhétie comptait environ 4 000 personnes. Aujourd’hui, il ne reste qu’une poignée de familles, soit environ 130 personnes. L’histoire de leurs ancêtres et de leur présence en Géorgie du Sud est fascinante. On retrouve d’ailleurs les tombes des premiers colons dans le cimetière du village.

Dans la Russie tsariste, la foi inébranlable des Doukhobors (« lutteurs spirituels ») dans le pacifisme leur a valu une réputation de radicaux. Ils ont notamment brûlé des fusils en signe de non-violence, ce qui a entraîné la déportation de nombreuses personnes en Sibérie.

Où manger en Javakhétie ?

Pontia à Tsalka

En 1989, la population grecque de Tsalka comptait 100 000 personnes. La famille d’Elena Chamurlid faisait partie des habitants d’origine grecque de la ville. Dans les années 1990, la plupart des familles ont quitté la Géorgie et émigré en Grèce. Les Chamurlid sont restés et ont ouvert leur propre restaurant en 1992.

Fondé par le père d’Elena, le restaurant Pontia sert une cuisine grecque et géorgienne. C’est l’un des rares restaurants de Tsalka où l’on peut s’asseoir, ce qui en fait l’un des préférés de la population locale et un lieu de visite incontournable pour les touristes.

Le poisson fraîchement pêché et les brochettes cuites en plein air sont les deux plats emblématiques. Le menu comprend tous les aliments de base géorgiens ainsi que des spécialités régionales telles que les pommes de terre bouillies et les asperges. Sur demande, Elena peut préparer une moussaka ou une salade grecque avec des olives noires et du fromage local.

Family corner sur le plateau de Javakhétie

Le restaurant Family corner à Gamdzani est sans nul doute la meilleure adresse du plateau de Javakhétie. Ici, comme son nom l’indique, c’est une cuisine familiale avec une base de poissons des lacs environnants. L’été, vous pouvez faire une pause sur la terrasse en plein soleil et profiter de l’air frais du plateau. Il servira de récompense pour les courageux qui auront fait la randonnée de la forteresse d’Abuli.

Randonner en Javakhétie

En partant des lacs du plateau de Javakhétie, il est très facile d’atteindre les forteresses construites sur les anciens cratères.

Forteresse de Shaori

Dominant le lac Paravani à 2 735 mètres au-dessus du niveau de la mer, la forteresse de Shaori est un trésor à bien des égards. Il s’agit non seulement du meilleur point de vue pour admirer la vue panoramique sur le plus grand lac de Géorgie en termes de superficie, mais aussi d’une structure cyclopéenne mégalithique datant de l’âge du bronze. C’est-à-dire à partir de blocs de basalte massifs sans utiliser de mortier.

Shaori n’a jamais fait l’objet d’une étude systématique – aucune fouille archéologique n’y a jamais eu lieu. Par conséquent, l’histoire de la structure, qui l’a construite et dans quel but exactement, reste un mystère. D’après les spécialistes, la forteresse a probablement été construite aux alentours du IIe millénaire avant notre ère.

Shaori Javakhétie
  • Distance : 3 kilomètres du pied de la montagne ou 14 kilomètres aller-retour depuis le village de Tambovka.
  • Durée : 4 heures du pied de la montagne ou 8 heures depuis Tambovka
  • Difficulté : moyenne. Le dernier kilomètre représente 450 mètres de dénivelé.

La randonnée commence au village féerique de Tambovka, une ancienne colonie doukhobor aux charmantes maisons aux volets bleus et aux toits de tourbe. De là, il vous faut marcher environ 5 kilomètres à travers les champs pour atteindre le pied de la montagne. Il est possible d’arriver à ce point en voiture si vous avez un bon 4×4.

Ensuite, pendant la plus grande partie de l’ascension et la totalité de la descente, vous devez grimper sur des champs de lave composés de roches basaltiques instables et irrégulières. Pour éviter les blessures, chaque pas doit être délibéré.

Forteresse d’Abuli

Au cœur du plateau de Javakhétie, la forteresse d’Abuli ressemble à celle de Shaori sauf qu’elle est plus massive avec des murs de 5 mètres de haut pour 3 mètres d’épaisseur.

  • Distance : 16 kilomètres aller-retour depuis le village de Gamdzani
  • Durée : Environ 8 heures de marche avec 1 heure sur place
  • Difficulté : moyenne avec un dénivelé de 550 mètres.
Abuli Javakhétie

L’itinéraire commence à l’entrée du village de Gandzani. Il passe devant l’église de Gandzani et le pont de Gandzani, sort du village et se dirige vers l’ouest, en direction du mont Patara Abuli. Au pied du mont Patara Abuli, une ancienne source est repérée dans un champ ouvert protégé par des pierres. De là part un affleurement rocheux escarpé et couvert d’herbe, qui mène au célèbre complexe mégalithique, construit selon la technique de la maçonnerie à sec il y a des milliers d’années. La forteresse d’Abuli, inaccessible, est entourée de murs de sept mètres, fortifiés par des remparts massifs.

Le fort se dresse fièrement sur un terrain rocheux à 2 670 mètres au-dessus du niveau de la mer, captive tous ceux qui osent s’en approcher et invite à emprunter ses rues étroites et carrelées, encore praticables aujourd’hui. Outre les vestiges mégalithiques, la forteresse d’Abuli offre des vues imprenables sur les montagnes volcaniques, les lacs bleus ou les étendues infinies.

Avez-vous déjà visité la région de Javakhétie ? Donnez vos impression dans les commentaires ci-dessous.

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